


Le mot de la rédaction, publié le 19/10/2025
Haute de 167,5 mètres, cette aiguille de brique perce le ciel turinois depuis 1889. On la repère à des kilomètres, impossible de la rater. Avec sa coupole néoclassique surmontée d'une flèche vertigineuse, la Mole Antonelliana incarne l'ambition démesurée de son architecte Alessandro Antonelli. Ce qui devait être une synagogue s'est transformé en symbole de Turin et en écrin du plus spectaculaire musée du cinéma au monde.
L'histoire commence en 1863, quand la communauté juive de Turin confie à Antonelli la construction d'un temple. Mais l'architecte voit plus grand, toujours plus grand. Les coûts explosent, les travaux traînent pendant 26 ans. Résultat : la ville rachète le bâtiment inachevé en 1877 pour en faire un monument à l'unité nationale. Cette folie de grandeur a donné naissance au plus haut édifice en maçonnerie d'Europe de son temps.
Les colonnes néoclassiques du rez-de-chaussée contrastent avec la verticalité gothique du dôme – un mélange éclectique que certains qualifient de kitsch, d'autres de génie visionnaire.
Depuis 2000, le Musée National du Cinéma occupe les entrailles de la Mole. Franchissez le rideau rouge de l'entrée et vous basculez dans l'envers du décor. Le parcours débute au niveau inférieur avec l'archéologie du cinéma : théâtres d'ombres chinois, lanternes magiques, kinétoscopes et autres ancêtres du grand écran. Ces dispositifs optiques racontent comment l'humanité a apprivoisé le mouvement des images bien avant les frères Lumière.
Arrivé au troisième étage, le souffle se coupe. L'intérieur de la Mole est entièrement creux. Le regard est aspiré vers le haut par cette cathédrale laïque où l'ascenseur de verre grimpe en 59 secondes jusqu'à la coupole. Au sol, des chaises longues rouges équipées d'enceintes individuelles font face à deux écrans géants. La lumière tamisée, les projections animées sur la voûte, l'imposante sculpture du film Cabiria (1914) et le cadran mécanique de Metropolis suspendu en hauteur créent une atmosphère unique.
Impossible de ne pas s'installer quelques minutes pour regarder un extrait de film dans ce temple dédié au septième art.
Le conseil d'ami : les samedis et dimanches à 12h et 16h30, vous pouvez grimper à pied entre les calottes de la coupole, une expérience méconnue qui permet de comprendre l'architecture interne du bâtiment. Comptez une heure pour la montée et la descente. Réservation non nécessaire, mais arrivez en avance.
L'ascenseur panoramique vous propulse à 85 mètres de hauteur pour un spectacle à 360 degrés. Turin s'étend sous vos pieds avec ses toits rouges, ses arcades géométriques et ses places baroques. Au-delà, les collines verdoyantes du Pô et, par temps clair, la barrière majestueuse des Alpes enneigées ferme l'horizon. Ce point de vue est le plus complet de la ville, inauguré en 1961 pour célébrer le centenaire de l'unification italienne.
Le musée conserve un patrimoine colossal : 80 000 photographies, 300 000 affiches, 20 000 appareils et 12 000 bobines de films. Les étages supérieurs dévoilent des salles thématiques dédiées au western, à la science-fiction, à l'horreur ou encore à la comédie. Costumes, décors, scripts annotés, équipements de tournage : chaque objet raconte une histoire. La scénographie interactive signée François Confino transforme la visite en expérience cinématographique où vous êtes à la fois spectateur et acteur.
*Informations sujettes à variation