
Le mot de la rédaction, publié le 01/10/2025
Au bout d'une étroite langue de sable et de galets qui s'avance dans le Moray Firth, un phare blanc veille depuis 1846. Mais ce n'est pas ce gardien maritime qui attire les foules sur cette pointe balayée par les vents : ce sont les grands dauphins qui viennent chasser à quelques mètres du rivage, offrant l'un des plus beaux spectacles naturels d'Écosse.
La géographie de ce lieu en fait un site d'exception. L'étroitesse du détroit à cet endroit crée des courants puissants qui concentrent les bancs de saumons. Les grands dauphins, aussi appelés tursiops, connaissent parfaitement cette zone de chasse privilégiée. Résidents permanents du Moray Firth, ils forment la colonie la plus septentrionale au monde de leur espèce.
Contrairement aux excursions en bateau souvent frustrantes, l'observation depuis la terre ferme offre ici des conditions idéales. Les dauphins s'approchent si près qu'on distingue leur silhouette fuselée et leurs sauts spectaculaires sans jumelles, même si ces dernières révèlent des détails fascinants de leur comportement de chasse.
Les chances d'apercevoir les cétacés dépendent entièrement du rythme des marées. Le moment optimal se situe deux à trois heures après la marée basse, lorsque le flux montant pousse les saumons vers les rivières Ness et Beauly. C'est alors que les dauphins arrivent en groupe, profitant de la turbulence de l'eau pour piéger leurs proies.
Le spectacle varie selon les jours. Parfois, une demi-douzaine de dos luisants fendent les vagues à moins de vingt mètres du bord. D'autres fois, un saut acrobatique surprend l'assemblée des observateurs. La patience reste de mise : il faut parfois attendre une heure avant la première apparition, mais la récompense vaut largement l'attente.
Le conseil d'ami : consultez les horaires des marées avant de venir et privilégiez les jours de grandes marées avec de forts coefficients. À marée basse en milieu de journée, revenez deux heures plus tard pour maximiser vos chances. Les mois d'été offrent les meilleures opportunités, car les dauphins se rassemblent davantage près des côtes pour suivre les bancs de poissons.
Dessiné par l'ingénieur Alan Stevenson et allumé pour la première fois en 1846, le Phare de Chanonry Point guidait les navires à travers les eaux traîtresses du Moray Firth. Automatisé depuis 1984, il continue de balayer l'horizon de son faisceau lumineux. Ses abords ne se visitent pas, mais sa silhouette blanche complète parfaitement le tableau sauvage de cette pointe exposée aux éléments.
À quelques pas du phare, une plaque commémorative rappelle la mort tragique de Coinneach Odhar, le célèbre voyant des Highlands. Selon la légende, ce visionnaire du XVIIe siècle fut exécuté ici même, brûlé vif dans un tonneau de goudron bouillant sur ordre de Lady Seaforth. Son crime ? Avoir révélé les infidélités du comte lors d'un séjour à Paris.
La pierre, coulée en 1969 par les élèves de l'académie de Fortrose, marque l'endroit présumé de cette exécution barbare. Les prophéties du Brahan Seer restent célèbres dans le folklore écossais : il aurait prédit la bataille de Culloden, la construction du canal calédonien et même la réouverture du Parlement écossais.
Le petit parking sur place accueille une trentaine de véhicules et se remplit rapidement en haute saison. Arrivez au moins une heure avant le moment idéal d'observation, ou mieux encore, stationnez à Fortrose ou Rosemarkie et marchez environ vingt minutes jusqu'à la pointe par le sentier côtier qui traverse le golf.
Prévoyez des vêtements chauds et imperméables : la pointe reste exposée aux vents même en plein été, et l'attente peut être longue. Aucune installation sanitaire n'existe sur place ; les toilettes les plus proches se trouvent à Rosemarkie. Un marchand de glaces ambulant stationne parfois près du parking lors des beaux jours.
Au-delà des dauphins stars du lieu, scrutez la surface pour apercevoir des phoques gris émergeant au loin, des marsouins traversant l'estuaire, et avec un peu de chance, une loutre européenne chassant le long des rochers. Le ciel accueille une avifaune variée, des goélands aux sternes arctiques.
*Informations sujettes à variation