Visiter le Palais de l'Achilleion : avis, tarif 2025 et conseils pratiques

Le palais de l'Achilleion, refuge impérial au-dessus de la mer Ionienne

Le mot de la rédaction, publié le 21/10/2025

Les cyprès montent la garde autour d'une demeure blanche perchée sur les hauteurs de Gastouri. Depuis les terrasses, le regard embrasse les collines boisées qui descendent en cascade jusqu'à la mer. Ce palais néoclassique, construit entre 1889 et 1891, porte le nom du héros grec le plus tragique : Achille. L'impératrice Elisabeth d'Autriche, cette femme aussi fascinante que tourmentée, y cherchait un sanctuaire loin de la cour de Vienne et de ses blessures.

Pourquoi le palais de l'Achilleion mérite-t-il le détour ?

L'histoire de ce lieu raconte deux vies brisées par le destin. Sissi, comme on surnommait affectueusement l'impératrice, fit construire cette villa après le suicide de son fils unique Rudolf en 1889. Elle confia sa vision à l'architecte italien Raffaele Caritto : une demeure digne du héros Achille, celui qui méprisait les mortels et ne craignait pas les dieux. Le style pompéien choisi évoque les palais antiques de Phéacie décrits par Homère.

Après l'assassinat de Sissi en 1898, le palais resta abandonné pendant neuf années avant d'être racheté par le kaiser Guillaume II d'Allemagne. L'empereur transforma cette retraite mélancolique en centre diplomatique européen, y recevant intellectuels et têtes couronnées jusqu'à la Première Guerre mondiale.

Les deux guerres mondiales convertirent ensuite le bâtiment en hôpital militaire. Aujourd'hui, ce musée ouvert au public témoigne d'une époque où l'aristocratie européenne vouait un culte passionné à l'antiquité grecque.

Le hall d'entrée et les appartements impériaux

La fresque des Quatre Saisons accueille les visiteurs dès le plafond du hall principal. Les escaliers de marbre mènent aux étages supérieurs, encadrés par les statues de Zeus et Héra. Sur le palier, une colonnade ionique délimite l'ancien espace privé de l'impératrice, où les bustes des neuf Muses voisinent avec ceux de philosophes grecs.

Au deuxième étage, la grande salle expose le tableau monumental de Franz Matsch représentant le triomphe d'Achille traînant derrière son char la dépouille d'Hector jusqu'aux portes de Troie. Les salons conservent quelques meubles d'époque et objets personnels ayant appartenu à Sissi et au kaiser. Une petite chapelle complète la visite des intérieurs, modeste mais touchante dans sa sobriété.

Les jardins mythologiques et leurs trésors sculpturaux

Le péristyle des Muses

La terrasse sud forme le cœur émotionnel du palais. Neuf statues de marbre blanc représentant les Muses entourent ce péristyle à colonnes : Clio pour l'histoire, Euterpe pour la musique, Thalie pour la comédie, Melpomène pour la tragédie, Terpsichore pour la danse, Erato pour la poésie lyrique, Polymnie pour les hymnes, Uranie pour l'astronomie et Calliope pour la poésie épique. Le panorama qui s'ouvre depuis cette esplanade embrasse les collines verdoyantes jusqu'à la mer scintillante en contrebas.

L'Achille mourant, chef-d'œuvre d'Ernst Herter

Au centre des jardins en terrasses trône la sculpture qui incarne l'âme du palais. Le sculpteur allemand Ernst Herter acheva cette œuvre en marbre blanc en 1884. Elle représente le héros au moment précis où il tente d'arracher la flèche qui s'est fichée dans son talon, sa seule partie vulnérable. Le visage levé vers le ciel, les traits crispés par la douleur, Achille tient encore une courte épée dans sa main droite.

La posture du corps, à demi affaissé, capture l'instant tragique où la force invincible cède devant la mortalité. Sissi pouvait contempler cette statue depuis son péristyle, y trouvant peut-être un écho à sa propre vulnérabilité.

L'Achille triomphant du kaiser

Au bas des jardins se dresse une statue de bronze monumentale de plus de dix mètres de haut. Guillaume II la commanda au sculpteur Johannes Götz pour remplacer la vision mélancolique de Sissi par une incarnation de la puissance guerrière. Achille y apparaît en armure complète d'hoplite, brandissant son épée, un bouclier orné d'une tête de gorgone destinée à pétrifier les ennemis.

Les palmiers qui l'encadrent soulignent la silhouette héroïque tournée vers le nord, comme un gardien surveillant la ville de Corfou.

Le conseil d'ami : visitez le palais en fin d'après-midi, vers 17h-18h. La lumière dorée du soleil couchant magnifie alors les statues de marbre blanc, les cars de touristes se sont évaporés et vous pouvez profiter du péristyle des Muses dans une quiétude proche de celle que recherchait Sissi. Les jardins ferment à 20h en haute saison, vous laissant tout le temps d'explorer.

Une végétation luxuriante entre palmiers et bougainvilliers

Kaiser Guillaume II engagea le botaniste réputé Carl Ludwig Sprenger pour restaurer et enrichir les jardins négligés pendant neuf années d'abandon. Les essences rares importées du monde entier s'épanouissent aujourd'hui dans ce microclimat doux : palmiers majestueux, cyprès élancés, oliviers centenaires, bougainvilliers éclatants cascadant sur les murs ocre.

Les allées serpentent entre les bosquets parfumés, révélant au détour d'un virage une fontaine, une statue de Dionysos portant un satyre sur ses épaules, ou un buste de poète.

Les jardins en gradins descendent la colline sur plusieurs niveaux, offrant à chaque palier un nouveau point de vue sur le paysage environnant. Bancs de pierre et recoins ombragés invitent à la contemplation face à l'immensité bleue de la mer Ionienne.