

Au cœur de Berlin se dresse un édifice qui a traversé les tempêtes du XXe siècle. Le Palais du Reichstag n'est pas un monument comme les autres : ses murs portent les cicatrices de l'histoire, de l'incendie de 1933 aux graffitis des soldats soviétiques de 1945, soigneusement préservés lors de sa renaissance.
Construit entre 1884 et 1894 par l'architecte Paul Wallot, le Reichstag devait incarner la grandeur du nouvel Empire allemand. Près d'un siècle plus tard, après avoir été incendié, bombardé et laissé à l'abandon pendant la Guerre froide, l'édifice renaît de ses cendres. En 1999, après quatre années de métamorphose orchestrée par l'architecte britannique Norman Foster, le bâtiment retrouve sa vocation première : abriter le Bundestag, le parlement de l'Allemagne réunifiée.
L'inscription dorée qui orne son portique, "Dem Deutschen Volke" (Au peuple allemand), prend alors tout son sens. Le métal qui compose ces lettres provient de canons français pris en 1814. Mais c'est surtout le message qu'elles portent qui résonne aujourd'hui avec force : ce bâtiment appartient au peuple.
La pièce maîtresse de cette renaissance porte un nom : la coupole de verre. Haute de 23,5 mètres et large de 40 mètres, cette structure futuriste défie la gravité avec ses 800 tonnes d'acier et ses 3000 m² de verre. Au centre, un cône tapissé de 360 miroirs crée un jeu de lumière fascinant : le jour, il capte la lumière naturelle pour illuminer l'hémicycle en contrebas. La nuit, il opère l'inverse, transformant la coupole en lanterne qui signale aux Berlinois que leurs députés siègent.
La double rampe hélicoïdale qui serpente le long de la coupole déploie 230 mètres de parcours en spirale jusqu'au sommet. Une fois là-haut, vous profitez d'un panorama à 360 degrés sur Berlin.. Pendant l'ascension, un audioguide gratuit disponible en français raconte l'histoire du bâtiment et identifie les monuments que vous découvrez.
Cette transparence n'est pas un hasard : Foster a conçu ce lieu pour que les citoyens puissent littéralement regarder leurs représentants travailler. La démocratie se vit ici de manière tangible.
Lorsque vous déambulez dans les couloirs du Reichstag, levez les yeux. Sur les murs, des inscriptions en cyrillique témoignent du passage de l'Armée rouge en mai 1945. Ces graffitis, tracés au charbon dans les décombres encore fumants, portent les noms de jeunes soldats, leurs villes d'origine et parfois quelques mots simples : "Hitler kaputt", "De Moscou à Berlin", "Kilroyski était là". Norman Foster a fait le choix audacieux de les conserver lors de la rénovation, créant un dialogue troublant entre passé et présent.
Foster n'a pas reconstruit un bâtiment, il a orchestré une conversation entre les époques. L'enveloppe néo-Renaissance du XIXe siècle enveloppe des espaces résolument contemporains. Les traces des bombardements ont été conservées volontairement. Dans un jardin intérieur inattendu, vous découvrirez une œuvre végétale unique : des plantes issues de graines et de terres apportées par les députés de toutes les régions allemandes, symbole vivant de l'unité retrouvée.
Le conseil d'ami : présentez-vous au guichet du Service des visites sur la Scheidemannstraße (près du Berlin-Pavillon) si vous n'avez pas réservé. Des créneaux sont attribués selon les disponibilités jusqu'à deux heures avant la visite. Privilégiez un jour de semaine tôt le matin pour maximiser vos chances.
Le Reichstag n'est pas qu'un bâtiment historique, c'est un manifeste architectural sur la transparence démocratique. Quand vous contemplez Berlin depuis son sommet, vous ne faites pas que photographier un panorama : vous vous tenez au-dessus du lieu où se décide l'avenir de l'Allemagne, dans un édifice qui incarne mieux que tout autre les bouleversements du XXe siècle européen. Peu de monuments au monde racontent une histoire aussi dense avec autant d'intelligence architecturale.
*Informations sujettes à variation