Visiter Kamakura : là où le Japon médiéval rencontre l'océan

Le mot de la rédaction, mis à jour le 28/11/2025

À moins d'une heure de Tokyo, le temps semble avoir ralenti dans cette ancienne capitale samouraï coincée entre montagnes boisées et Pacifique. L'odeur d'encens flotte depuis les temples zen, le petit train Enoden traverse les quartiers résidentiels en rasant les maisons, et sur les plages, les surfeurs guettent la prochaine vague avec la même patience que les moines en zazen.

Pourtant, Kamakura n'a rien d'un musée figé. Entre deux visites de sanctuaires, on croise des hipsters devant des cafés design, des ados font la queue pour des beignets à la patate douce, et le week-end, les Tokyoïtes débarquent en masse pour une bouffée d'air marin.

Pour les amoureux d'histoire et de nature (mais pas de solitude)

Kamakura s'adresse aux voyageurs qui veulent comprendre le Japon sans s'éloigner de Tokyo, qui cherchent temples et nature sans renoncer aux plaisirs balnéaires. Les passionnés d'histoire bouddhiste et de culture zen y trouveront leur compte avec plus de 60 temples à explorer. Les familles apprécieront l'accessibilité depuis la capitale et les plages surveillées. Les amateurs de randonnée pourront suivre les sentiers forestiers qui relient les temples à flanc de colline.

En revanche, si vous détestez la foule, préparez-vous à une déception cuisante. Le week-end et pendant la saison des hortensias en juin, les temples populaires croulent sous les visiteurs et les files d'attente s'étirent sur des centaines de mètres. L'été sur les plages, c'est la cohue absolue. Et si vous espérez une immersion zen solitaire comme dans les films, vous risquez surtout de contempler le dos d'autres touristes photographiant les mêmes lieux instagrammables.

Un budget japonais classique

Comptez entre 100 et 130€ par jour et par personne pour profiter pleinement de Kamakura, incluant transport depuis Tokyo, entrées des temples (entre 200 et 500 yens chacun), repas dans des restaurants corrects et éventuellement une nuit sur place. Les repas oscillent entre 800-1500 yens pour un déjeuner simple et 2500-4000 yens pour un dîner dans un bon restaurant de fruits de mer. Le trajet Tokyo-Kamakura coûte environ 950 yens par trajet.

Les temples zen : méditer entre deux selfies

Le Grand Bouddha du Kotoku-in trône en plein air depuis qu'un tsunami a emporté son temple protecteur au XVe siècle. Cette statue de bronze de 13 mètres représente Amida Bouddha dans sa sérénité éternelle, indifférent aux hordes de touristes qui prennent la pose devant lui. Pour 50 yens supplémentaires, on peut même entrer à l'intérieur et constater que le géant est creux. Arrive tôt le matin ou en fin de journée si tu veux l'apprécier sans jouer des coudes.

À quelques minutes à pied, le temple Hase-dera grimpe à flanc de colline avec vue plongeante sur l'océan. La statue de Kannon aux onze têtes, haute de 9 mètres, y veille dans une semi-pénombre dorée. Mais ce sont les milliers de petites statues de Jizo alignées sur les chemins qui impressionnent vraiment : ces divinités bouddhistes protègent les enfants décédés, et voir leurs rangées infinies coiffées de bavoirs rouges procure une émotion rare. En juin-juillet, plus de 2500 hortensias transforment les pentes du temple en vagues bleues et violettes.

L'incontournable Tsurugaoka Hachimangu

Le sanctuaire shintoïste Tsurugaoka Hachimangu domine le centre de Kamakura depuis le XIIe siècle. C'est ici que le shogun Minamoto no Yoritomo établit son pouvoir, marquant le début de l'ère des samouraïs. L'allée principale bordée de torii vermillon et les deux étangs ornés de lotus créent un décor de carte postale. Le week-end, on y célèbre mariages traditionnels et cérémonies, offrant aux visiteurs un spectacle authentique de la culture japonaise. Juste à côté, la rue commerçante Komachi-dori grouille de boutiques de souvenirs et de stands de street food.

Le conseil d'ami : pour éviter la cohue touristique, commence ta journée par les temples de Kita-Kamakura comme l'Engaku-ji ou le Kencho-ji, le plus ancien monastère zen du Japon. À 8h du matin, tu seras quasiment seul dans ces complexes forestiers majestueux où l'on peut assister aux chants matinaux des moines.

Le temple aux hortensias et la forêt de bambous

Le Meigetsu-in, surnommé le "temple des hortensias", mérite sa réputation même en dehors de juin. La fenêtre circulaire du hall principal encadre le jardin comme une peinture vivante qui change selon les saisons : cerisiers au printemps, verdure en été, érables flamboyants en automne. Pendant la saison des hortensias, arrive avant l'ouverture à 8h30 pour éviter l'affluence qui rend la visite cauchemardesque. Les quelque 2500 plants d'himeajisai teintent alors le jardin d'un bleu intense qu'on appelle le "bleu Meigetsu-in".

Plus au sud, le Hokoku-ji cache une surprenante forêt de bambous où filtrent des rayons de soleil créant une ambiance presque irréelle. Certes, c'est bien plus petit qu'à Arashiyama près de Kyoto, mais la sérénité y reste intacte. Après la promenade dans les bambous, offre-toi une cérémonie du thé matcha (500 yens) dans le pavillon donnant sur le jardin. Respirer l'amertume du thé en contemplant le vert hypnotique des bambous constitue un moment hors du temps.

Le conseil d'ami : les sentiers de randonnée Daibutsu, Tenen et Giontama relient plusieurs temples à travers les collines boisées. Comptes 1 à 2 heures de marche facile dans la nature, avec en prime des tombes rupestres (yagura) taillées dans la roche et des points de vue sur la ville. En décembre, les feuillages d'automne y sont spectaculaires.

Le bord de mer et le charme rétro de l'Enoden

Les plages de Yuigahama et Zaimokuza attirent les Tokyoïtes dès les premiers rayons de soleil estival. Certes, ne t'attends pas à du sable blanc paradisiaque : c'est du sable gris japonais classique, et l'été la densité humaine rivalise avec celle du métro aux heures de pointe. Mais l'ambiance californienne, les surfeurs au petit matin, les guinguettes de plage (umi no ie) servant bières et yakisoba de juillet à août, tout ça donne à Kamakura son âme balnéaire unique.

Le petit train électrique Enoden, qui relie Kamakura à Fujisawa en longeant la côte, incarne le Japon rétro qu'on croyait disparu. Les rames colorées de 1950 traversent des passages tellement étroits qu'on pourrait toucher les maisons depuis les fenêtres, frôlent la plage où roulent les vagues, s'arrêtent dans des gares minuscules perdues entre mer et montagnes. Le passage devant l'école de la station Kamakurakoko-mae, immortalisé dans l'anime Slam Dunk, attire les pèlerins qui viennent recréer les plans du générique.

Le conseil d'ami : achète un pass Enoshima-Kamakura Free Pass (1640 yens) qui inclut l'aller-retour depuis Shinjuku et l'utilisation illimitée de l'Enoden. Si tu as le temps, pousse jusqu'à l'île d'Enoshima accessible par un pont : sanctuaires, grottes marines, vue sur le Mont Fuji par temps clair et fruits de mer fraîchement pêchés.

Saveurs marines et douceurs sucrées

La spécialité locale incontournable, c'est le shirasu : ces minuscules alevins de sardine ou d'anchois translucides pêchés dans la baie de Sagami. On les mange crus (quand c'est la saison de mars à décembre) ou bouillis, servis sur un bol de riz fumant avec gingembre et oignons nouveaux. Le shirasu-don se décline dans des dizaines de restaurants, mais les meilleures adresses se trouvent près des ports de Koshigoe et Hase. Le restaurant Shirasuya à Koshigoe, géré directement par des pêcheurs, sert des versions imbattables mais prépare-toi à faire la queue 40 minutes.

Sur la rue commerçante Komachi-dori, goûte les biscuits en forme de colombe de Toshimaya (une institution locale depuis 120 ans), les curry buns de Giraffa fourrés à 30 épices et fromage fondant, ou les takoyakis garnis de shirasu chez Kamakura J's. Plus surprenant : la glace à la patate douce violette d'Imoyoshi, crémeuse et pas trop sucrée, devenue culte chez les visiteurs.

Le conseil d'ami : pour un vrai repas traditionnel végétarien shojin ryori (cuisine bouddhiste), réserve au restaurant Hachinoki près du Kencho-ji. Ces plats raffinés sans protéines animales, servis dans des bols laqués, reflètent la philosophie zen du respect de la nature.

Où manger et boire à Kamakura ?

Au-delà du shirasu omniprésent, Kamakura se distingue par ses légumes de Kamakura-yasai cultivés localement et sa scène café étonnamment développée. Le kamameshi, riz cuit dans une marmite de fonte avec fruits de mer et légumes de saison, se savoure au Kamakama près de la gare. Pour les burgers après la plage, Good Mellows à Yuigahama grille ses steaks sur charbon de bois dans une ambiance surf californienne. Les amateurs de soba fraîches maison fileront au Matsubara-an, une maison traditionnelle avec terrasse sur jardin où les nouilles se préparent devant vous.

Côté douceurs, Tsubame Cafe occupe une vieille maison japonaise où l'on sert des teishoku (déjeuners complets) dans une vaisselle artisanale soigneusement choisie. Le Mont Blanc Stand ne propose que des desserts à base de châtaignes, avec des saveurs changeant selon les saisons. Et pour un matcha de qualité cérémonielle, Hatoya venu de Kyoto a ouvert une annexe servant sept variétés différentes selon la période de l'année.

Où dormir à Kamakura et aux alentours ?

La plupart des visiteurs font l'aller-retour dans la journée depuis Tokyo, mais passer une nuit permet d'explorer Kamakura tôt le matin avant l'arrivée des foules. Les options d'hébergement restent limitées et assez chères. Près de la gare de Kamakura, l'Hotel Metropolitan propose des chambres modernes à partir de 15000 yens. Pour une expérience plus locale, les quelques ryokan comme le Kamakura Rakuan offrent l'hospitalité japonaise traditionnelle avec tatamis et yukata, comptez 20000-30000 yens par personne avec repas.

Les voyageurs à petit budget se tourneront vers les auberges de jeunesse comme le WeBase Kamakura près de Yuigahama (dortoirs à partir de 3000 yens) ou chercheront un hébergement à Fujisawa ou Yokohama, moins chers et reliés par l'Enoden ou la ligne JR. Les quartiers près des plages comme Yuigahama ou Zaimokuza offrent quelques guesthouses avec vue mer, idéales pour les surfeurs matinaux.

Comment se rendre et se déplacer à Kamakura ?

Depuis Tokyo, prends la ligne JR Yokosuka depuis Tokyo Station (950 yens, 55 minutes) ou la ligne JR Shonan-Shinjuku depuis Shinjuku (950 yens, 60 minutes). Ces lignes sont couvertes par le JR Pass. Alternative plus pittoresque mais plus longue : ligne Odakyu jusqu'à Fujisawa puis l'adorable train côtier Enoden jusqu'à Kamakura. Le pass Enoshima-Kamakura Free Pass (1640 yens depuis Shinjuku) inclut aller-retour et Enoden illimité.

Une fois sur place, le centre-ville se parcourt aisément à pied. Les temples de Kita-Kamakura et ceux du secteur Hase sont espacés de 20-30 minutes de marche. L'Enoden dessert efficacement les sites côtiers (310 yens de Kamakura à Hase). Des bus municipaux rejoignent les temples excentrés comme Hokoku-ji. La location de vélos (1000-1500 yens/jour) près de la gare facilite les déplacements, mais attention aux montées raides vers certains temples.

Quand y aller ?

Les meilleures périodes sont mars-avril pour les cerisiers en fleur et novembre-décembre pour les érables flamboyants, avec des températures agréables (10-20°C) et moins de monde. Juin-début juillet attire les foules pour la saison des hortensias, magnifique mais étouffante de touristes et coïncidant avec la saison des pluies. Juillet-août voit déferler les estivants sur les plages, avec chaleur humide (30°C+) et foules maximales. L'hiver (janvier-février) reste doux (5-15°C) et offre par temps clair des vues spectaculaires sur le Mont Fuji depuis la côte, avec l'immense avantage de temples quasi déserts.