
Visiter Siem Reap, là où les temples millénaires rencontrent l'Asie bohème
Le mot de la rédaction, mis à jour le 25/10/2025
Les premières lueurs du jour transpercent la jungle cambodgienne. Devant vous, les cinq tours d'Angkor Wat se découpent dans une symphonie de roses et d'orangés. Autour, des centaines de voyageurs retiennent leur souffle. Bienvenue à Siem Reap, cette petite ville du nord-ouest du Cambodge qui héberge l'un des plus extraordinaires héritages architecturaux de l'humanité. Mais réduire cette destination aux seuls temples serait passer à côté de l'essentiel : ses ruelles coloniales où flottent des effluves de citronnelle, ses marchés débordant de mangues mûres à point, ses artisans qui sculptent le bois avec la même patience que leurs ancêtres khmer.
Siem Reap, le paradis des voyageurs au long cours
Disons-le franchement : si vous détestez croiser d'autres touristes, Siem Reap risque de vous décevoir. Les temples d'Angkor attirent plus de deux millions de visiteurs annuels, et pour cause. Mais si vous acceptez de partager l'expérience avec le monde entier, vous découvrirez une destination taillée sur mesure pour les amateurs d'histoire, les photographes en quête de lumière divine, et les routards qui veulent étirer leur budget sans sacrifier le confort.
La ville convient particulièrement aux voyageurs qui aiment mélanger exploration culturelle et moments de détente. Trois à cinq jours suffisent pour saisir l'essence du lieu : assez pour explorer les principaux temples à vélo, s'offrir quelques massages à prix mini, goûter à la gastronomie khmer en plein essor, et s'immerger dans la vie nocturne bon enfant de Pub Street. Les familles avec enfants apprécieront la douceur cambodgienne et les infrastructures touristiques bien rodées. Seuls les chercheurs de nature sauvage et d'authenticité totale devront pousser plus loin dans la campagne.
Un budget qui fait sourire le portefeuille
Voici l'argument massue : Siem Reap reste l'une des destinations les plus abordables d'Asie du Sud-Est. Comptez 15 à 25 dollars par jour en mode routard (dortoir à 3-6$, nourriture de rue à 2-3$ le repas, location de vélo), 40 à 60 dollars en confort intermédiaire (chambre climatisée, restaurants locaux corrects, quelques bières sur Pub Street où l'happy hour propose des drafts à 50 cents), et 100 dollars ou plus si vous visez le luxe avec spa et restaurants gastronomiques. Les passes pour Angkor coûtent 37$ pour un jour, 62$ pour trois jours. Apportez des dollars américains en billets impeccables, c'est la monnaie locale de facto.
Les temples d'Angkor, évidemment
Impossible d'esquiver le sujet. Le complexe archéologique s'étend sur 400 kilomètres carrés de jungle, parsemé de quelque 50 temples érigés entre le IXe et le XVe siècle par l'Empire khmer. Angkor Wat, le plus célèbre, hypnotise avec ses tours élancées et ses bas-reliefs narrant les épopées hindoues. Mais ne vous arrêtez pas là.
Ta Prohm vous plonge dans une atmosphère de film d'aventure, ses pierres enlacées par les racines géantes de fromagers séculaires. Bayon, au cœur d'Angkor Thom, fascine avec ses 216 visages de pierre qui sourient dans toutes les directions. Les temples moins fréquentés comme Preah Khan ou Banteay Srei, à une heure de route, offrent une intimité bienvenue loin des hordes du lever de soleil.
Le conseil d'ami : oubliez le lever de soleil à Angkor Wat si vous fuyez les foules. Préférez explorer les temples à vélo en empruntant les chemins secondaires qui serpentent dans la forêt. Le parcours de la porte Est à la porte Sud d'Angkor Thom longe les douves et offre des vues spectaculaires dans une relative tranquillité. Et surtout, équipez-vous d'un pantalon léger ample en coton, ces fameux "elephant pants" que vendent tous les marchés pour trois fois rien, parfaits pour affronter chaleur et règles vestimentaires des temples.
La ville coloniale et ses marchés vivants
Le centre-ville de Siem Reap conserve son âme de bourgade indochinoise. Autour du Vieux Marché (Psar Chas), les façades coloniales délavées racontent l'histoire du protectorat français. Le marché lui-même déborde de vie dès l'aube : étals de poissons fraîchement pêchés dans le Tonlé Sap, paniers tressés, tissus aux motifs traditionnels.
Pour échapper au côté touristique, poussez jusqu'au Psar Leu, le grand marché où les locaux font leurs courses. Ici, pas de t-shirts Angkor Wat mais des montagnes de fruits tropicaux, des viandes séchées, et cette animation quotidienne qui pulse au rythme khmer. Le Made in Cambodia Market mérite aussi le détour : les artisans y vendent directement leurs créations, de la céramique à la soie tissée main.
Pour comprendre le poids de l'histoire récente, visitez le Musée des Mines Antipersonnel. Son fondateur, ancien enfant-soldat des Khmers rouges, consacre sa vie à déminer le pays. L'exposition sobre et pédagogique rappelle qu'entre 4 et 6 millions de mines restent enfouies au Cambodge. Le Wat Thmey, mémorial des Killing Fields local, offre également un éclairage nécessaire sur la période sombre du génocide.
Culture vivante et cirque cambodgien
Le soir venu, assistez à un spectacle du Phare Cambodian Circus. Cette troupe de jeunes acrobates cambodgiens mêle numéros physiques impressionnants et récits contemporains sur la vie au Cambodge. Les performances combinent danse traditionnelle Apsara, acrobaties dignes du Cirque du Soleil, et théâtre d'ombres. L'organisation à but non lucratif forme des jeunes défavorisés aux arts du spectacle. Réservez à l'avance, les places partent vite.
Les échappées nature aux portes de la ville
À une heure au sud, le lac Tonlé Sap étire ses eaux sur une superficie qui varie du simple au triple selon la saison. Entre mai et novembre, les pluies de mousson transforment ce lac peu profond en véritable mer intérieure, repoussant les villages flottants vers le large. Kampong Phluk offre une expérience plus authentique que le trop touristique Chong Kneas : maisons sur pilotis de dix mètres, forêt inondée de mangroves, pêcheurs lançant leurs filets depuis des barques étroites.
Cap au nord cette fois, vers le parc national de Phnom Kulen. Cette montagne sacrée abrite le Kbal Spean, appelé "la rivière aux mille lingas". Des sculptures hindouistes du XIe siècle tapissent le lit rocheux de la rivière : phallus de Shiva, divinités aquatiques, tout un panthéon minéral poli par les siècles de courant. La randonnée d'une heure dans la jungle pour y accéder fait partie du charme. En redescendant, baignez-vous dans les cascades de Phnom Kulen où les familles cambodgiennes pique-niquent le week-end, installant nappes et marmites au bord de l'eau.
Le conseil d'ami : combinez Kbal Spean avec la visite de Banteay Srei dans la même journée. Ce petit temple de grès rose, éloigné des grands circuits, éblouit par la finesse de ses sculptures. Négociez un forfait avec votre chauffeur de tuk-tuk pour la journée complète (environ 25-30$), vous économiserez sur les trajets individuels.
S'initier à la cuisine khmer
La gastronomie cambodgienne sort enfin de l'ombre de ses voisines thaïe et vietnamienne. Au cœur de cette cuisine, le kroeung, ce mélange d'épices et d'herbes aromatiques qui parfume curries et ragoûts. La citronnelle, le galanga, le curcuma frais et les feuilles de lime kaffir composent cette pâte fondamentale. Le prahok, poisson fermenté au goût puissant, joue le rôle de la sauce de poisson mais avec plus de caractère.
Côté plats emblématiques : l'amok, curry de poisson cuit à la vapeur dans une feuille de bananier avec lait de coco et kroeung, présente une texture crémeuse et des saveurs doucement épicées. Le lok lak se compose de bœuf sauté servi sur lit de laitue avec œuf frit, riz et sauce au poivre de Kampot. Justement, ce poivre réputé mondialement mérite qu'on s'y attarde : cultivé dans le sud du pays, il délivre des arômes floraux et fruités incomparables.
Pour goûter tout cela, trois options s'offrent à vous. Les échoppes de rue concentrées près des marchés proposent des nouilles sautées, du riz frit ou de la soupe traditionnelle pour 2 à 3 dollars. Khmer Grill incarne cette catégorie de restaurants familiaux adorables où l'accueil compense le décor modeste. En milieu de gamme, Sugar Palm sert dans une maison khmère traditionnelle en teck une cuisine familiale sublimée : leur prahok ktis (porc émincé au prahok) reste un must plus accessible que la version crue.
Pour une expérience gastronomique, Cuisine Wat Damnak s'impose (réservez des semaines à l'avance). Le chef français Joannès Rivière revisite les classiques khmers en menus dégustation de 5 ou 6 plats pour 27 à 31 dollars, utilisant exclusivement des produits locaux et de saison. Sa soupe de langoustine du Mékong au bouillon coco-cacahuète vaut à elle seule le voyage. Mahob et Jomno proposent une approche similaire, créative mais enracinée, dans des cadres contemporains élégants.
Où manger et boire à Siem Reap ?
Au-delà des adresses mentionnées, ne ratez pas Little Red Fox dans le charmant Kandal Village pour un excellent café cambodgien le matin (oui, le pays produit aussi du café), accompagné de pâtisseries maison. Pub Street concentre bars et restaurants dans une ambiance festive, parfois un peu too much. Les happy hours démarrent tôt, avec des bières à 50 cents et cocktails bradés. Pour une pause fraîche et sucrée, Blue Pumpkin sert des glaces artisanales dans des espaces climatisés design, parfait après une matinée à vélo sous 35 degrés.
Les cours de cuisine khmer fleurissent partout. Comptez environ 25 dollars pour trois heures où vous préparerez trois plats complets que vous dégusterez ensuite. Beaucoup incluent un passage au marché pour choisir les ingrédients avec le chef. Une excellente façon de rapporter des souvenirs comestibles, fiches recettes à l'appui.
Où dormir à Siem Reap et aux alentours ?
L'offre d'hébergement explose tous les budgets. En mode backpacker, les auberges pullulent : Onederz Hostel et Siem Reap Pub Hostel proposent des lits en dortoir entre 3 et 6 dollars avec piscine, localisation proche de Pub Street et ambiance internationale garantie. Ces hostels organisent souvent les excursions aux temples et facilitent les rencontres entre voyageurs solitaires.
En catégorie intermédiaire, les hôtels de charme abondent entre 20 et 60 dollars la nuit. Saem Siem Reap Hotel séduit avec sa piscine spectaculaire et son petit-déjeuner buffet généreux, à 15 minutes en tuk-tuk des temples. Pour un vrai luxe accessible, le FCC Angkor by Avani occupe l'ancienne résidence du gouverneur français, mêlant élégance coloniale et confort contemporain, piscine d'eau salée comprise.
Les petits budgets peuvent aussi loger dans des guesthouses tenues par des familles cambodgiennes, souvent à deux pas du centre pour 15 dollars. L'accueil y compense largement le standing basique. L'idéal reste de réserver au moins la première nuit à l'avance, puis de visiter d'autres options sur place si vous prolongez.
Comment se rendre et se déplacer à Siem Reap ?
Le tout nouvel Siem Reap-Angkor International Airport, inauguré fin 2023, a rapproché considérablement la ville de la piste. Des vols directs relient Siem Reap à Bangkok (1h), Hanoi, Ho Chi Minh Ville, Kuala Lumpur et Singapour. Depuis la France, comptez une escale. Le visa s'obtient à l'arrivée pour 30 dollars (prévoyez des billets neufs, le Cambodge refuse les coupures abîmées). Un taxi vers le centre coûte 30 dollars, le bus navette 8 dollars, les tuk-tuks négocient à 20 dollars.
Depuis Phnom Penh, des bus directs effectuent le trajet en 6 à 7 heures à travers la campagne cambodgienne pour 10 à 15 dollars. Ceux qui ont du temps apprécient le spectacle des rizières, des villages sur pilotis et des troupeaux de buffles. Des vols intérieurs existent aussi, 45 minutes de vol pour 50 à 80 dollars.
Sur place, oubliez la voiture de location. Le tuk-tuk règne en maître : comptez 15 à 25 dollars la journée pour un chauffeur qui vous attend devant chaque temple. Beaucoup de voyageurs adoptent le vélo (5$ la journée) ou le scooter (10$) pour explorer Angkor à leur rythme. Le centre-ville reste agréablement piétonnier. Pour Pub Street, vos jambes suffiront largement.
Quand y aller ?
La saison sèche de novembre à mars offre les conditions idéales : températures supportables (25-30°C), ciel dégagé, végétation encore verte après les pluies. C'est aussi la haute saison touristique avec les tarifs qui grimpent et les temples bondés au lever du soleil.
Avril-mai transforment le pays en fournaise (jusqu'à 40°C), tandis que juin à octobre apportent les pluies de mousson. Mais ne sous-estimez pas la mousson : les averses durent rarement toute la journée, les temples retrouvent leur magie sous la brume, et les prix chutent de 30 à 50%. Le lac Tonlé Sap atteint son niveau maximum, spectacle à ne pas rater.









