Visiter Nevsehir, la porte d'entrée vers un autre monde

Le mot de la rédaction, mis à jour le 20/10/2025

Imaginez une région où des civilisations ont creusé leurs refuges dans la roche pendant des millénaires. Où chaque matin, des dizaines de montgolfières colorent le ciel au lever du soleil. Où des villes entières se cachent sous vos pieds, à plusieurs étages de profondeur.

Voilà ce qui vous attend en débarquant à Nevsehir, capitale discrète mais stratégique de la Cappadoce. Beaucoup la traversent sans s'y arrêter, pressés de rejoindre les sites iconiques des environs. Erreur.

Cette cité moderne d'altitude cache son jeu : un château illuminé qui trône sur son promontoire rocheux, des vestiges de vingt civilisations successives, et une vie locale authentique loin des pièges à touristes. Sans oublier qu'elle reste le camp de base idéal pour rayonner vers les merveilles lunaires de la région.

Pour qui cette destination est-elle faite ?

Amateurs de paysages irréels et de patrimoine historique, vous êtes au bon endroit. La région est un terrain de jeu exceptionnel pour les photographes, les randonneurs et tous ceux qui rêvent de s'envoler en montgolfière au-dessus de formations géologiques uniques au monde.

En revanche, si vous cherchez la plage ou la fête nocturne endiablée, vous n'y trouverez pas votre bonheur. Le climat continental anatolien réserve des étés chauds et secs, des hivers parfois enneigés. Il faut aussi prévoir un budget conséquent pour certaines activités phares comme le vol en montgolfière (150 à 250 euros selon la saison).

Une voiture facilite grandement l'exploration des sites dispersés, même si des navettes touristiques existent. Comptez au minimum trois jours pour profiter pleinement de la région sans courir. Les familles apprécieront l'accessibilité de nombreux sites, même si certaines randonnées dans les vallées demandent une bonne condition physique.

S'envoler au-dessus des cheminées de fées

Le vol en montgolfière au lever du soleil reste l'expérience phare, celle qui justifie à elle seule le voyage. Dès 4h du matin, vous embarquez dans une nacelle pour une heure de vol magique au-dessus des vallées de Göreme et des formations rocheuses surnommées cheminées de fées.

Le spectacle est double : en bas, le paysage lunaire sculpté par l'érosion volcanique ; autour de vous, 80 à 300 ballons (selon la saison) qui dérivent en silence dans la lumière dorée du matin. C'est cher, c'est touristique, mais c'est véritablement inoubliable.

Le conseil d'ami : réservez votre vol pour votre premier matin sur place. Les vols dépendent de la météo et peuvent être annulés à cause du vent, de la pluie ou de la neige. Si c'est reporté, vous aurez encore des jours de marge pour retenter l'expérience.

Explorer les vallées et villages troglodytes

Göreme et son musée à ciel ouvert

À une dizaine de kilomètres de Nevsehir, Göreme concentre le meilleur du patrimoine rupestre cappadocien. Son musée à ciel ouvert, classé à l'UNESCO, rassemble un complexe monastique byzantin exceptionnel avec des dizaines d'églises creusées dans la roche entre les Xe et XIIIe siècles.

Les fresques intérieures, remarquablement préservées, racontent l'histoire des premiers chrétiens qui se réfugiaient ici pour échapper aux persécutions. L'entrée est payante (environ 15 euros) mais largement justifiée. Arrivez tôt le matin pour éviter les cars de touristes qui débarquent dès 10h.

Les villes souterraines : Kaymaklı et Derinkuyu

Sous vos pieds se cachent des cités entières creusées dans le tuf volcanique. Kaymaklı et Derinkuyu sont les plus impressionnantes, avec leurs huit niveaux souterrains (dont quatre visitables). Couloirs étroits, salles communes, églises, celliers à vin, puits de ventilation : tout était prévu pour accueillir des milliers de personnes pendant des mois.

L'expérience peut être claustrophobe avec les passages bas et étroits, mais elle reste fascinante. Comptez 1h30 de visite et prévoyez un pull, même en été : la température reste constante autour de 13°C sous terre.

Le conseil d'ami : si vous êtes limité en temps, choisissez Derinkuyu, la plus profonde et la mieux aménagée des deux. Les explications en anglais sont claires et le circuit de visite bien balisé.

Les vallées colorées pour les randonneurs

La Vallée Rose, la Vallée Rouge et la Vallée des Pigeons offrent des kilomètres de sentiers entre formations rocheuses ocre et rose. Les randonnées durent de 1h à 4h selon les itinéraires, avec des panoramas exceptionnels au coucher du soleil.

La Vallée d'Ihlara, plus au sud (85 km), mérite le détour malgré la distance. Ce canyon verdoyant de 14 km, bordé d'églises rupestres, offre une atmosphère totalement différente du reste de la Cappadoce. Attention : 300 marches vous attendent pour descendre dans la vallée.

Pour les amateurs de formations insolites, ne manquez pas Love Valley et ses pitons rocheux aux formes phalliques spectaculaires, ou Pasabag avec ses cheminées de fées à trois têtes, les plus photogéniques de la région.

Le centre-ville de Nevsehir mérite aussi l'attention

Son château ottoman, perché à 1343 mètres d'altitude, domine la ville moderne. Ses 48 créneaux s'illuminent chaque soir et offrent un belvédère magnifique sur la plaine environnante. L'accès est gratuit et la montée rapide.

Le Musée Müdürlüğü, rue Evler, présente une belle collection de bronzes, poteries et artefacts provenant des fouilles archéologiques locales. Rien d'extraordinaire, mais intéressant pour comprendre les 20 civilisations qui se sont succédé ici, des Hittites aux Ottomans.

Pour le shopping moderne, le Forum Kapadokya est un centre commercial dense avec toutes les enseignes habituelles. Utile pour dépanner, mais peu intéressant pour qui cherche l'authenticité.

Le conseil d'ami : flânez plutôt autour du jardin urbain Çocuk Parkı où les commerces locaux proposent artisanat et produits régionaux. C'est là que vous trouverez les vraies poteries cappadociennes, pas les imitations made in China.

Où manger et boire à Nevsehir ?

La cuisine cappadocienne mélange influences ottomanes et anatoliennes. Le plat star ? Le testi kebab, viande et légumes mijotés pendant des heures dans une jarre en terre cuite qu'on brise devant vous avec un petit spectacle théâtral. Cher (20 à 30 euros) mais mémorable.

Les mantı locaux diffèrent des raviolis turcs classiques : ici, on les roule en cylindre avant de les cuire, puis on les nappe généreusement de yaourt à l'ail et de beurre fondu. Réconfortant et copieux. Goûtez aussi la soupe bamya çorba (aux gombos) et les mezzes qui précèdent chaque repas.

Pour les gourmands, l'ayva dolması (coing farci à la viande épicée) mélange sucré-salé de façon surprenante. Le kuru kaymak, crème séchée très concentrée produite dans le village de Kaymaklı, accompagne parfaitement le petit-déjeuner turc traditionnel.

La Cappadoce produit également d'excellents vins qui mûrissent dans des caves troglodytes. Les domaines comme Kocabağ ou Turasan proposent dégustations et visites pour 6 à 10 euros. Les restaurants autour de Göreme (comme Seten) offrent le meilleur rapport qualité-prix avec vues imprenables.

Où dormir à Nevsehir et aux alentours ?

À Nevsehir même, les hôtels sont fonctionnels mais sans charme particulier. Le vrai intérêt réside dans les villages environnants qui proposent des hôtels troglodytes aménagés dans d'anciennes habitations rupestres.

Göreme, Uçhisar et Ürgüp concentrent les meilleures adresses, du boutique-hôtel de luxe avec terrasse panoramique (200 euros et plus) aux pensions familiales abordables (40-60 euros). Dormir dans une chambre creusée dans la roche, avec cheminée et chauffage au sol, constitue une expérience en soi.

Réservez plusieurs mois à l'avance pour les périodes d'avril-mai et septembre-octobre. Les prix grimpent de 30 à 50% en haute saison. En hiver, de nombreux établissements bradent leurs tarifs et la région sous la neige possède un charme féerique, même si certains vols en montgolfière sont annulés.

Pour les petits budgets, Avanos, à 20 minutes de Göreme, propose des hébergements moins chers tout en restant bien placé. Cette ville-atelier, célèbre pour ses potiers, a gardé son atmosphère de village authentique.

Comment se rendre et se déplacer à Nevsehir ?

L'aéroport de Nevsehir se situe à 30 km du centre, avec des bus et taxis assurant la liaison (environ 15 euros). Depuis la France, comptez une escale obligatoire à Istanbul, puis 1h15 de vol supplémentaire. L'aéroport de Kayseri, plus grand, constitue une alternative à 80 km avec davantage de liaisons internationales.

Sans voiture, vous dépendrez des circuits organisés ou des dolmus (minibus collectifs) qui desservent les principaux sites. Pratique mais contraignant niveau horaires. Louer un véhicule (30-50 euros/jour) change vraiment la donne pour explorer à votre rythme, surtout pour les vallées éloignées comme Ihlara.

Les distances entre sites restent courtes : 10 km jusqu'à Göreme, 20 km pour Uçhisar, 30 km pour les villes souterraines. Le réseau routier est correct. Attention en hiver : la neige peut rendre certaines routes glissantes, et les pentes autour de Nevsehir sont raides.

Des bus longue distance relient Istanbul (9-10h de trajet, 20-30 euros), Ankara (4h) et toutes les grandes villes turques. Confortables et fiables, ils constituent une bonne alternative à l'avion.

Quand y aller ?

Les mois d'avril-mai et de septembre-octobre offrent le meilleur compromis : températures agréables (15-25°C), paysages éclatants (fleurs sauvages au printemps, tons dorés en automne), et fréquentation modérée. Les vols en montgolfière décollent régulièrement grâce au temps stable et aux vents faibles.

L'été (juillet-août) attire les foules et la chaleur peut frôler les 40°C en pleine journée, même si les matinées et soirées restent supportables. C'est aussi la saison la plus chère avec jusqu'à 300 ballons dans le ciel chaque matin. Si vous supportez la cohue, les festivals comme le Cappadox en juin valent le détour.

L'hiver transforme la région en carte postale enneigée et vous aurez les sites presque pour vous seul. Mais préparez-vous au froid (souvent en dessous de 0°C) et aux annulations possibles des vols en montgolfière à cause de la météo. Décembre et janvier restent très calmes côté tourisme.

À éviter absolument : début avril quand les vents forts perturbent les vols en ballon, et les grands week-ends turcs où les locaux envahissent la région.