Alger la blanche, la belle qui ne se livre pas au premier regard

Le mot de la rédaction, mis à jour le 03/12/2025

L'odeur de café noir et de jasmin flotte dans l'air du matin. Dans les ruelles escarpées de la Casbah, un vendeur de beignets installe son étal tandis que la ville s'éveille en contrebas, étalée entre collines et Méditerranée.

Capitale de la plus grande nation d'Afrique, cette métropole de quatre millions d'âmes fascine autant qu'elle déroute. On l'appelle "la Blanche" pour ses façades couleur craie qui dégringolent vers le port, ou "la Joyeuse" pour l'énergie brute de ses habitants. Les deux surnoms lui vont bien.

Une destination qui demande un peu d'audace

Soyons clairs : cette ville n'est pas formatée pour le tourisme de masse, et c'est précisément ce qui fait son intérêt. Vous croiserez peu de visiteurs étrangers dans les rues. Les infrastructures touristiques restent modestes comparées aux capitales voisines. Mais pour qui accepte de sortir des sentiers balisés, la récompense est immense. La médina classée à l'UNESCO, les palais ottomans oubliés, l'accueil chaleureux des Algérois, la cuisine généreuse : tout cela appartient encore à une forme de découverte sincère.

Ce voyage convient aux curieux patients, aux amateurs d'histoire et d'architecture, aux voyageurs qui préfèrent l'imprévu au confort standardisé. Il décevra ceux qui attendent un service hôtelier irréprochable ou qui supportent mal l'improvisation. L'obtention du visa demande quelques démarches, la circulation en ville peut être chaotique, et certains quartiers nécessitent d'être accompagné. Mais depuis 2022, le visa à l'arrivée facilite l'accès pour les touristes passant par une agence agréée.

Un budget très accessible

Comptez entre 50€ et 100€ par nuit pour un hôtel correct en centre-ville, les établissements haut de gamme type Hôtel El Aurassi ou Hyatt Regency tournent autour de 150€ à 200€. Un repas copieux dans un restaurant traditionnel coûte 5€ à 15€, les trajets en métro ou tramway ne dépassent pas 0,50€. L'entrée des musées reste symbolique.

La Casbah : l'âme millénaire d'une ville

Ce dédale de ruelles pentues classé au patrimoine mondial de l'UNESCO concentre l'essence même de la capitale. Construite sur une colline culminant à 120 mètres, la médina s'étend sur 50 hectares où vivent encore 50 000 habitants. La Place des Martyrs constitue le point de départ idéal, là où des fouilles récentes ont révélé des vestiges phéniciens. La basse Casbah, la plus animée, regorge de marchés, d'échoppes d'artisans et de petites gargotes où l'on déjeune pour quelques dinars.

Plus vous grimpez, plus le calme s'installe. La mosquée Jemaa-Kebir, édifiée en 1097, est la plus ancienne de la ville. La mosquée Ketchaoua avec ses deux minarets et la mosquée Jamaa al-Jdid de style ottoman méritent qu'on s'y attarde. Les palais Dar Aziza et de la Jenina témoignent du luxe des demeures du XVIe siècle. Dans les ruelles historiques, vous passerez devant la maison où se cachaient les résistants de la bataille d'Alger en 1957, aujourd'hui transformée en musée.

Conseil d'ami : faites-vous accompagner par un guide local pour votre première visite. Les jeunes guides nés dans le quartier connaissent chaque recoin et chaque histoire. Comptez environ 1200 dinars par personne pour une balade de 4 à 5 heures.

Le centre-ville : héritage français et vie algéroise

La partie moderne s'étale en contrebas, le long du front de mer. La Grande Poste constitue le symbole architectural de la ville avec son style néo-mauresque aux arcades blanches immaculées. Entrez-y sans but précis, juste pour admirer les mosaïques et les voûtes. La rue Didouche Mourad, ancienne rue Michelet, reste l'artère commerçante principale où les Algérois se retrouvent pour le café et les emplettes.

Le quartier de Bab El Oued, immortalisé par le cinéma algérien, incarne l'esprit populaire de la ville. Sa Place des Trois Horloges en est le cœur battant. Le front de mer aménagé permet de belles promenades en fin de journée. Les pâtisseries du quartier perpétuent des recettes ancestrales : éclairs au chocolat, millefeuilles, mais aussi les spécialités sucrées du Ramadan comme la zlabiya et le kalb ellouz.

Sur les hauteurs : basilique et jardins

La basilique Notre-Dame d'Afrique surplombe la baie depuis sa falaise, perchée à 124 mètres. Son architecture rappelle Notre-Dame de la Garde à Marseille, les voyageurs français y retrouveront des repères familiers. La vue sur la baie et la ville basse vaut à elle seule la montée. Le quartier de Télemly, avec ses immeubles des années 1950, offre un autre panorama sur la métropole.

Le Jardin d'Essai du Hamma, créé en 1832, s'impose comme le poumon vert de la capitale. Ce jardin botanique de 32 hectares abrite plus de 3000 espèces végétales. On y flâne entre jardin français, jardin anglais et parc zoologique. Juste à côté, le Musée national des Beaux-Arts expose plus de 8000 œuvres, ce qui en fait le plus important musée d'art du continent africain.

Sites à ne pas négliger

  • Le Mémorial du Martyr et sa vue panoramique sur la baie
  • Le Musée du Bardo, ancien palais ottoman dédié à la préhistoire et à l'ethnographie
  • Les ruines romaines de Tipaza, à 70 km à l'ouest, pour une excursion d'une journée
  • Le port et le boulevard Che Guevara le long du front de mer

Où manger et boire à Alger ?

La cuisine algéroise marie les influences berbères, ottomanes et méditerranéennes dans des plats généreux et parfumés. La chorba, soupe de légumes et de viande parfumée à la coriandre, ouvre traditionnellement chaque repas durant le Ramadan. La rechta algéroise, fines nouilles de semoule servies avec du poulet, des navets et des pois chiches dans une sauce parfumée à la cannelle, compte parmi les plats emblématiques de la capitale.

Le couscous se décline ici en dizaines de versions : aux légumes, à la viande séchée, aux fèves, parfois sucré avec des raisins secs et de la cannelle. Les boureks, cigares frits farcis à la viande ou au fromage, se dégustent en entrée ou sur le pouce. Côté sucré, les makroudhs aux dattes, les dziriettes aux amandes et les cornes de gazelle accompagnent le thé à la menthe.

Le restaurant Dar El Sultan, ancien hammam du XVIIIe siècle transformé en table traditionnelle, offre un cadre typiquement algérois. La Maison du Couscous, rue Ernest Zeys, sert des plats traditionnels copieux pour environ 1500 dinars. Pour une cuisine plus raffinée, le Tantra Restaurant marie saveurs méditerranéennes et françaises dans un décor élégant.

Où dormir à Alger et aux alentours ?

Le quartier d'Alger-Centre, autour de la Grande Poste et de la rue Didouche Mourad, permet de tout faire à pied. Les hôtels y sont nombreux, du 3 étoiles fonctionnel type City Hotel aux établissements plus luxueux. Le métro et les bus desservent bien le secteur. C'est le choix idéal pour une première visite.

Le quartier d'Hydra, sur les hauteurs, abrite des résidences haut de gamme et les ambassades. Plus calme, il convient aux voyageurs d'affaires ou à ceux qui recherchent le confort. Pour une immersion totale, quelques maisons d'hôtes proposent des chambres dans la Casbah même, avec terrasses panoramiques sur la baie. Comptez à partir de 30€ la nuit.

Comment se rendre et se déplacer à Alger ?

Les vols directs depuis Paris durent environ 2h15. Air Algérie, Air France et Transavia assurent plusieurs rotations quotidiennes. Les tarifs oscillent entre 150€ et 300€ l'aller-retour en basse saison, mais peuvent doubler voire tripler en été et pendant les fêtes. Réservez deux à trois mois à l'avance pour les meilleurs prix. L'aéroport Houari Boumédiène se trouve à 20 km du centre-ville, comptez 30 minutes en taxi.

Sur place, le métro relie les quartiers sud au centre historique, jusqu'à la station Place des Martyrs aux portes de la Casbah. Le tramway dessert l'est de l'agglomération sur 23 km. Un ticket unique métro/tramway coûte 70 dinars. Les taxis jaunes restent le moyen le plus pratique pour les trajets spécifiques, négociez le tarif avant de monter ou exigez le compteur. Plusieurs téléphériques relient les quartiers bas aux hauteurs de la ville, offrant des panoramas spectaculaires.

Quand y aller ?

Le printemps et l'automne offrent les meilleures conditions : températures douces entre 15°C et 25°C, lumière magnifique sur la baie. L'été peut être étouffant avec des pics à 35°C en juillet-août. L'hiver reste doux mais parfois pluvieux.

Évitez si possible le Ramadan si vous comptez beaucoup manger en journée, mais cette période offre des soirées festives et une atmosphère particulière une fois le soleil couché.